GRIPPE MEDIATIQUE
Ooooh...
j'ai fait un rêve bizarre cette nuit. J'étais dans mon champ,
tranquille, à gratter le sol pour me nourrir tout en profitant du
soleil, quand tout à coup ils sont arrivés. Les poulets du service
vétérinaire!! En moins de temps qu'il n'en faut pour dénicher de la
terre un bon gros ver bien dodu, la moitié de mes congénères était
transporté dans un camion à destination d'un ailleurs inquiétant. Quant
à moi, terminée la vie au grand air, je me retrouvais confiné dans un
box suffocant et pestinentiel, le corps gavé d'anti-viraux. Atroce.
Je
peux vous dire que mon réveil a été brutal. L'esprit encore embrumé,
des mots surgissent inconsciemment de mon cerveau : H5N1, Tamiflu,
pandémie, masques de protection... Oulah mais serais-je encore en train
de rêver? C'est en allumant ma radio que je compris ce qui m'arrivait.
GRIPPE AVIAIRE!!! J'étais frappé par la fièvre de la surinformation.
Presse écrite, audiovisuelle, internet, impossible d'y échapper.
L'affreux virus est partout. Cette surenchère médiatique était pourtant
prévisible. Agitez un chiffon rouge devant le nez d'un journaliste
aujourd'hui et il s'empressera de le transformer en drap pour lit king
size. La réflexion? Non! Le sensationnel? Plutôt deux foix qu'une. Tout
est bon pour faire peur à la population. Jusqu'à l'indigestion.
Il
faut pourtant croire que les médias n'en font pas assez. Eh oui
tenez-vous bien, selon un sondage*, les français naviguent dans
l'inconnu sur ce sujet. Incroyable non? Ca laisse songeur. Un nouveau
virus (mais est-il nouveau?...) semble frapper la population. Une
maladie tellement puissante qu'elle supprime tout esprit critique. La
pauvre victime, frappée d'amnésie chronique, ne retient plus rien,
submergée par un effroyable sentiment d'incompréhension doublé d'une
peur panique incontrôlable.
A force de crier au loup sans
expliquer ce qui se cache sous les poils de la bête, pas étonnant que
la confusion règne. Ce matraquage médiatique stérile qui privilégie
l'émotion au détriment du fond ne fait qu'alimenter cette grande
machine à décerveler qu'est devenue la société. Nous ne réagissons plus
qu'à des slogans, déclarations fracassantes, imags percutantes. Nous ne
prenons plus le temps d'analyser, de croiser les faits, de les
apprécier. La gastronomie de l'information est morte. Vive le fast-food
média! Vite avalé, vite digéré, vite oublié. Nous sommes des
boulimiques du prêt-à-penser. A qui la faute? A la presse sans doute. A
force de faire du moindre fait divers qui ne ferait pas trois lignes
dans un journal régional un évènement à la une sur cinq colonnes, nous
sommes devenus incapables de faire le distingo entre une information de
première importance et un banal ragot de quartier. La grippe aviaire
est un sujet suffisamment sérieux pour se passer d'un tel traitement.
*une
enquête d'IPSOS pour Top Santé réalisée les 7 et 8 octobre révèle que
64% des français se disent mal informés sur la grippe aviaire.