Travailler plus... pour gagner moins!

On vit dans une époque formidable. Pour citer Coluche, tout le monde est heureux, les ouvriers travaillent, les patrons patronnent... Welcome in Happyland!! Quoi le chômage? Quoi des mécontentements? Quoi des grèves? Mais de quoi se plaint-on! L'économie va mieux non? Les entreprises françaises enregistrent des bénéfices records en 2004, donc le plein emploi va revenir et les salaires vont augmenter... c'est sûr... sûr?

Je vais vous raconter l'histoire d'un salarié lambda. Bac +3, petit bagage professionnel, pas mal de rêves en tête, mais dont l'esprit d'initiative est un peu bloqué par un CDI à 30 heures par semaine certes rassurant, mais financièrement peu confortable. Le 10 mars il était content le petit employé. Il a montré au méchant gouvernement combien il était gonflé à bloc pour la défense de ses droits sociaux. Lui et plusieurs centaines de milliers de personnes partout en France. Là il se dit qu'enfin le message va passer.

Bon, les manifs c'est bien beau, mais il faut penser à retourner au boulot. Ca tombe bien, le petit employé travaille le soir, de 18 heures à minuit. Après le défilé, le gagne-pain. Il arrive à son bureau, salue ses collègues, et se fait héler par son responsable. "Bonjour, tu vas bien? Dis-moi j'ai une proposition à te faire, tu peux venir un instant dans mon bureau?". Oh oh, enfin la reconnaissance du travail bien fait se dit-il. Peut-être même qu'une promotion est à envisager...
C'est là que ça se gâte. Notre salarié se voit proposer un changement d'horaires. "Tu peux intégrer l'équipe du matin, ce qui inclue un passage à 35 heures par semaine". Chouette! une hausse de salaire! Le problème, ajoute le responsable, c'est que ce changement d'horaires s'accompagne d'une perte de ta prime de nuit. Mais bon, avec 5 heures de plus, tu ne perdras que 20 euros par mois par rapport à ton ancien revenu. STOP!!! "qu'essaie-t-il de me dire?" se demande le petit employé. Travailler plus, pour gagner moins? Mais dites-moi, est-ce bien logique tout cela? C'est ça la réponse du patronat au ras-le-bol général des salariés?

Cette histoire pourrait prêter à sourire si elle n'était pas tirée d'un fait réel. C'est pourtant la triste fable d'une société qui tourne en rond, autour d'un gros tas de fric de préférence, monstrueuse Tour de Babel à la gloire d'un libéralisme mégalomane et nombrilique. Un athlète gonflé aux hormones, mais totalement désorienté car aveugle et sourd, incapable de distinguer le mur vers lequel il fonce. Quelqu'un a des pansements?...